De juin à septembre 2000
Participants : Michel Chartier, André Lefeuvre, Nathalie
Modoux et Bertrand Gonthiez.
Après un séjour rapide à Tegucigalpa, c’est
en bus (climatisé avec TV !) que nous nous rendons à Choluteca
pour retrouver le personnel de Caritas Honduras. Arrivés à
l’évêché, endroit où se trouvent ses locaux,
ils nous font visiter le bureau qui sera le nôtre pendant un mois
(nous déménagerons dans un autre à l’arrivée
de Bertrand). Chargés de nous trouver un logement, ils nous ont
réservé des chambres dans un hôtel en attendant que
la maison que nous devons louer se libère (ce qui est fait le lendemain,
mais 4 jours nous seront nécessaires pour récupérer
les clefs …).
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« Votre mission, si vous l’acceptez, consiste à réaliser 5 réseaux d’eau potable dans des communautés géographiquement distantes et dans certains cas inaccessibles par voie carrossable. Vous disposerez du financement de l’Agence de l’Eau Seine-Normandie, d’une voiture avec chauffeur, de 2 litres d’eau par jour et d’une bonne paire de chaussures. Un délai de 3 mois vous est accordé… »
Sûr qu’on accepte ! On est venu pour ça.
Premier chantier : Colonia Satelite projet codeh
Installé à côté de Choluteca, d’un accès rapide et facile, ce chantier ne présente à priori aucune difficulté . Le terrain est quasiment plat, un puits a été foré et équipé d’une pompe par Action Contre la Faim. L’Agence de l’Eau Seine Normandie finance la tuyauterie et la communauté se charge de trouver le financement du réservoir. C’est une affaire qui roule…
« et les tuyaux ils arrivent quand ?
- heu… attendez… il nous faut au moins 15 jours pour faire la reconnaissance
précise des 5 projets et passer commande… Et après il y a
des délais de livraison… ce sera là dans un mois …
- mais… c’est qu’on a déjà fait les tranchées
!!!
- déjà ????? (ça ne faisait que 5 jours que nous
étions à Choluteca).
- oui, on nous a prêté une pelle mécanique.
- allons voir ça… »
Vision apocalyptique de rues éventrées, impraticables à tout type de véhicule et c’est à dos d’homme que les propriétaires des terrains transportent le ciment et les parpaings nécessaires à la construction de leur maison…
Pas grave, ils sont astucieux, le chantier se fera vite et on aura plus de temps à consacrer aux autres. Petite erreur de jugement… Lorsque les tubes ont enfin été là, que la ligne principale a été posée, il n’y avait plus personne pour creuser les traversées de rues… Trop fatigant, il fallait prendre la pioche et la pelle…
A ce jour le chantier n’est pas terminé (il manque des tranchées)
et du matériel (des robinets) a été volé soit
disant par une autre colonia… La communauté n’a pas trouvé
les fonds nécessaires à la construction du réservoir…
Deuxième chantier : Colonia Gracias a Dios
Également d’un accès facile ce chantier ne présentait
aucune difficulté technique bien qu’un piquage sur le réseau
existant de la ville soit nécessaire. C’était sans compter
sur les difficultés politiques faites par le président du
comité de l’eau de la ville… Nous avons donc été bons
pour faire, en sa compagnie, un diagnostic du réseau d’adduction
existant…
Puis nous avons appris que le fontanero de la ville s’est fait payer
70 lempiras par chaque famille de la colonia. Ces dernières doivent
également verser 75 lempiras à la
junta del agua (3) de la ville pour avoir la permission
d’être raccordé au réseau de la ville . Qu’est-ce que
c’est que cette histoire ? Et pourquoi personne ne nous a rien dit plus
tôt ???? Nous avons fait appel à Caritas pour nous aider à
résoudre ce différend…(cela nous a coûté 2 heures
de discussions houleuses avec la junta del agua )
La pause des canalisations est terminée, il reste à réaliser
le piquage sur la conduite de la ville et à remplacer une partie
de la canalisation existante.
Troisième chantier : Santa Irene
Village facile d’accès mais chantier plus difficile que les deux
précédents car nécessitant une plus grande longueur
de tuyaux et la réalisation d’un captage.
Le maçon, assez astucieux, n’a eu aucun mal à réaliser
le captage. Par contre, au départ des travaux de pose de canalisation,
il n’y avait pas de fontanero. L’albanil, voulant rendre service, a donc
improvisé… et nous a fait n’importe quoi… Ne soyons pas médisants,
rien d’irrécupérable, que du temps perdu (c’est pas grave,
on n’a que ça, du temps à perdre !!!!).
La pose des canalisations est terminée mais malgré une
consommation gargantuesque de ciment et de nombreuses explications, le
captage fuit toujours même si l’eau y atteint un niveau satisfaisant…
Signalons également un problème de pollution causé
par une maison en amont. Des latrines et un lavoir sont à prévoir…
Ce chantier s’est achevé plus tôt que prévu…
Quatrième chantier : Las Ventanas
Alors là ! ça se complique… Presque deux heures d’une piste effroyable pour se rendre jusqu’au manguier où nous parquons la voiture avant de poursuivre une demi-heure à pied. Mais ça en valait la peine : village paradisiaque, eau à volonté, arbres fruitiers à profusion et nourriture excellente (à chaque visite nous avions droit à un plat préparé par une famille du village, et il était hors de question de refuser…).
Par contre le chantier nous a réservé quelques «
bonnes » surprises…. Cauchemar des nuits blanches sans sommeil de
Michel : le pont permettant de passer la canalisation suspendue sur une
cinquantaine de mètres. D’abord le concevoir, ensuite trouver une
entreprise capable de réaliser les poteaux et les ancrages métalliques,
puis calmer les ardeurs d’un maçon trop entreprenant qui a voulu
faire les massifs en béton avant qu’on ne lui fournisse le plan,
pour finalement être sur place à chaque étape de cette
réalisation afin d’arrêter de perdre du temps à faire,
défaire et refaire…
Ce chantier est quasiment terminé bien qu’une épidémie
de malaria ait touché 44 personnes du village dont le fontanero
...
Cinquième chantier : La Lamilla
Avant de partir au Honduras on savait que c’était le chantier le plus difficile et le plus grand de tous… et on n’a pas été déçu… après une petite heure de route et de piste on abandonne la voiture pour commencer une longue balade avec des paysages féeriques dignes des chemins de grandes randonnées mais une topographie sans pitié pour notre résistance physique.
Comme c’était un chantier difficile nous nous y rendions souvent
(2 fois par semaine) et c’était un minimum de 6 heures de marche
effrénée à monter, descendre, s’arrêter, discuter,
remonter, redescendre…Mais nous n’allons pas nous plaindre, c’est chargés
de sacs de ciment ou de tuyauteries en acier galvanisé que les villageois
accomplissaient ce même parcours… (plus de 6 km de canalisation en
tubes de 6 mètres, ça en fait des allers-retours !)
Et, bien entendu, ici aussi nous avons eu droit à notre lot
de déconvenues…Dès la première visite même !
Le terrain d’où suintait la source s’était effondré,
ce qui a abaissé son niveau d’une cinquantaine de mètres.
Le seul endroit où nous pouvions faire le captage, suite à
cet incident fâcheux, n’appartenait pas à la communauté.
C’est une fois de plus grâce à Caritas que l’achat de ce terrain
a été négocié.
L’albanil ne savait pas lire les plans, mais a eu la franchise de nous
le dire. Suite à nos explications et avec l’aide d’un autre maçon
il a très bien réalisé le captage ainsi que les divers
réservoirs et brise-charges nécessaires à ce projet.
Il a été difficile de trouver un fontanero pour cette
communauté isolée de tout. Il y en avait un dans un village
voisin qui aurait préféré poser des tubes de PVC ou
faire de la maçonnerie. Oui, mais il y avait déjà
deux maçons et compte tenu de la topographie du secteur et des pressions
d’eau on ne peut utiliser que de l’acier galvanisé…
Il a finalement accepté, commis quelques impairs et les travaux
se poursuivent aujourd’hui.
Évidemment, superviser 5 chantiers à deux ou trois personnes
maximum, même en travaillant 6 jours sur 7, ça ne fait jamais
qu’une visite par chantier par semaine (le jour restant c’est journée
bureau…). Ça laisse 5 jours pour que les erreurs s’accumulent …
On aurait pu se séparer et doubler les passages dans les projets,
mais il nous aurait fallu une voiture supplémentaire.
On aurait pu camper dans les chantiers les plus difficiles, mais il
aurait fallu que nous soyons au moins 4 en permanence.
A ces difficultés se sont ajoutées celles apportées
par notre fournisseur de matériel. Des retards ont été
accumulés suite à des délais de livraison non respectés,
des livraisons de matériels défectueux (vannes non étanches)
ou inadaptés (pièces mâles avec filetage différent
des pièces femelles).
Trois mois plus tard, la mission n’est pas accomplie. On joue donc les
prolongations en septembre avec Bertrand et Michel.
Ce délai supplémentaire permettra de terminer entièrement
les 5 projets.