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EDITORIAL

De la passion de notre métier à une action collective de solidarité

La passion de notre métier au service de l’homme

Chacun connaît l’histoire de ce grand chantier de construction où à la question : «Qu’est-ce que vous êtes en train de faire?» trois ouvriers répondirent, le premier : «je casse des cailloux» ; le second : « je gagne ma vie» ; le troisième : «je construis une cathédrale».
Cette anecdote reste d’actualité. L’évocation par Pascal Marin du travail de son père Gilbert a profondément ému les anciens qui ont connu l’épopée des chantiers de grands barrages, : « un solide travail d’ingénieur, dans la tradition humaniste d’une technique qui ne soit pas commandée par la seule puissance de l’argent mais s’intègre à la perspective d’un projet, avec tout son poids d’humanité».
Ce message vécu dans notre vie professionnelle a toujours été présent dans notre Association technique pour le développement et se traduit au quotidien par une constante volonté de valoriser le travail manuel, moyen d’échange à équitable avec nos partenaires villageois. Nous mettons aussi toute notre intelligence et nos compétences au service du projet qui nous a été confié par ces mêmes partenaires, tout en sachant que nous avons autant à recevoir qu’à partager, depuis la conception jusqu’à la réalisation.

Une action collective de solidarité

Tout aussi important, un deuxième message complète le précédent : une personne , quelle que soit sa valeur individuelle, doit s’appuyer sur un véritable travail d’équipe et intégrer son action dans un projet collectif de solidarité.
Ainsi, nous saluons la naissance et la multiplication dans de nombreuses grandes entreprises de clubs humanitaires et de développement, à l’initiative du personnel et encouragés par les Directions. Ils améliorent à la fois l’image de marque de leur entreprise et la motivation des volontaires, même dans leur travail professionnel. Tout le monde est ainsi gagnant.
Toutes ces initiatives contribuent à sensibiliser le milieu de travail et le monde industriel et, comme la traditionnelle B.A. (bonne action) scoute, elles peuvent avoir un rôle pédagogique incontestable, lancer une action de développement durable, c’est-à-dire plus efficace à long terme en s’attaquant aux causes profondes du sous-développement et non seulement à ses résultats.

Cela suppose cependant quelques conditions minimales de cohérence dans la politique de l’entreprise : que la main gauche humanitaire ne ferme pas les yeux sur une main droite qui exploiterait la misère. C’est bien qu’EDF “sponsorise” des projets d’aide au Tiers-monde, mais c’est encore mieux qu’elle ne coupe plus le courant aux familles incapables de payer leurs factures. Nous nous réjouissons que les volontaires de la Lyonnaise ou de Vivendi puissent voler au secours des populations pour leur apporter le minimum d’eau potable à chaque catastrophe humanitaire, qu’elles soient le fait des hommes comme au Rwanda, ou de la nature comme en Amérique centrale. Espérons que cette solidarité dans l’urgence arrive à se prolonger «en temps normal» dans les grandes cités du Tiers-monde par des contrats de fourniture d’eau accessibles aux populations les plus défavorisées.

De même, les syndicats devraient être des lieux privilégiés d’une action collective de solidarité. La notion de service public doit être défendue en tenant compte non seulement de la situation privilégiée des agents statutaires mais aussi de celle des autres salariés qui travaillent à leur côté et sont souvent infiniment moins bien lotis ou encore de la situation des chômeurs. Il arrive que le respect d’un statut prétendu immuable empêche l’embauche des jeunes.
Face à cet égoïsme catégoriel et corporatiste, caricature du syndicalisme, pourquoi s’étonner que beaucoup de jeunes se détournent de l’action collective et essayent de «tirer leur épingle du jeu» à titre individuel.
Ainsi, notre monde n’est pas toujours aussi simple et manichéen : d’un côté, les affreux capitalistes exploiteurs, et de l’autre, les bons et vaillants travailleurs dont la plupart, du moins en France, ne sont plus des «prolos».

Le champ d’une solidarité active est immense. HSF espère que son action, la formation de nombreux jeunes ingénieurs et techniciens en compagnonnage avec des anciens, contribue à rendre un peu plus citoyennes et solidaires nos entreprises et bureaux d’études, nos syndicats comme nos Associations.

 Brice WONG