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Lettre ouverte à ceux qui auraient quelques réticences envers l’emploi-jeunes à HSF

En exagérant beaucoup, j’ai cru me retrouver en pleine bataille d’Hernani, la classique querelle des Anciens et des Modernes. La comparaison s’arrête là. Il n’y eût ni bataille rangée, ni même cris de passion : d’une part, nous étions entre gens de bonne compagnie ; d’autre part, il se faisait tard et le débat s’est vite clos pour des raisons d’horaire. Ce qui a motivé cette scission entre générations, ce fût l’approbation d’une initiative du bureau de HSF : créer un ou deux “emplois-jeunes” afin d’aider les membres de ce bureau dans le travail quotidien à HSF, de participer aux différentes missions tout en se formant au métier d’ingénieur hydraulicien.

Les “Anciens” ont voté unanimement “pour”, voyant dans cette motion deux avantages.

l’allègement des tâches de certains d’entre eux. N’oublions pas que HSF a été créé par de “jeunes” retraités qui y ont apporté leur compétence, leur énergie et leur passion. HSF a grandi en nombre de participants, a pris de l’âge... mais eux aussi! Conscients de l’inexorable marche du temps, c’est un appel à l’aide qu’ils lançaient à travers ce projet. Ce sont eux qui assurent pour le moment la cohésion d’HSF; la question posée est donc à terme la survie de l’Association.

Une occasion d’aider les Jeunes à trouver un emploi Ce deuxième argument se place sur un tout autre plan. Pour nous qui sommes des générations n’ayant pas connu le chômage, la “galère” actuelle de nombreux jeunes représente un échec de la société. Nous nous angoissons pour eux (ne sont-ils pas nos enfants ?) avec un obscur sentiment de culpabilité en tant que membre responsable de cette société même si, individuellement, nous nous sentons impuissants. Or cette création de poste n’est-elle pas l’occasion de les aider à avoir à court terme un emploi, certes peu rémunéré (pourtant, le salaire est supérieur au SMIC et nombre d’entreprises privées sont encore moins généreuses pour un premier emploi), mais surtout d’acquérir une formation professionnelle et de prendre des contacts pour ensuite obtenir un vrai poste, plus conforme aux ambitions compatibles avec une formation d’ingénieur

Un certain nombre de jeunes se sont poliment abstenus. Pourquoi ? Cela m’a surpris et je ne suis pas la seule! Un seul, votant “non”, a exprimé publiquement son désaccord. Etait-il vraiment le porte-paroles des autres ? Après quelques discussions rapides avec plusieurs d’entre eux, j’ai essayé de comprendre.. Voici ma propre interprétation ainsi que mes réactions...

Il y a d’abord et de manière tout à fait générale le scepticisme et la méfiance envers les emplois-jeunes : des “emplois au rabais” où l’on cherche à les occuper à moindre frais pour faire baisser le taux du chômage. Que répondre ? Bien sûr, personne n’a prétendu -même l’inventeur, Martine Aubry- que ces emplois sont la panacée universelle! Ils sont un moindre mal, en attendant un vrai poste, effectivement une occupation plutôt que de rester chez soi, à “broyer du noir” en attendant tous les matins le passage du facteur avec un hypothétique rendez-vous pour un entretien... Et cela ne représente que le cas le plus favorable de ceux qui sont nourris et hébergés par les parents... Il y en a d’autres pour qui “emplois-jeunes” veut dire “manger”! C’est la possibilité d’avoir pour certains enfin quelquechose à écrire sur la page desespérément vierge de leur CV à la rubrique “expérience professionnelle”. Pour d’autres, et c’est l’engagement de HSF, c’est la véritable occasion d’une formation et de liens tissés avec les entreprises, à terme génératrices d’emplois.

Autre interrogation exprimée : ces emplois-jeunes proposés par HSF, ne sont-ils pas des postes de secrétariat proposés à de jeunes ingénieurs ?

Là, il y a deux réponses : bien sûr, il y a du travail de secrétariat (fait actuellement par des diplômés de Grandes Ecoles!) mais il y a aussi la préparation des missions et le travail sur le terrain. Monter de tels projets à la fois sur le plan technique et sur le plan financier requiert la compétence de spécialistes. Et vous qui avez fait des stages en entreprises, votre idéalisme n’a-t-il pas déjà été mis à mal en constatant quelle part de routine et de paperasse il y avait à faire même dans un emploi de cadre ?

Une question importante : HSF vit pour le moment de l’enthousiasme et de l’engagement désintéressé de volontaires à la fois “seniors” et “juniors” pour de nobles causes. Engager du personnel rémunéré n’est-ce pas à terme initier une dérive d’HSF vers un statut de bureau d’études, exerçant une concurrence déloyale envers les entreprises officielles? Il ne faut pas jouer avec les mots. Il y a déjà des permanents à HSF : ceux qui répondent au téléphone, assurent la cohésion de l’Association, ceux qui préparent les missions (entre participer à la mission et la préparer véritablement, il y a une nuance importante !) Même l’organisation d’une Assemblée générale représente un travail en amont et en aval qu’en tant que “consommateur” on a tendance à sous-évaluer. Ces permanents ont pour le moment la chance de bénéficier de leur etraite. Qu’ils soient aidés par des Jeunes implique bien sûr un roulement d’argent plus important pour HSF, donc plus de missions permettant d’assurer le salaire des permanents. Mais toute Organisation Non Gouvernementale, toute Association un peu importante fonctionne ainsi ! En augmentant ses activités, HSF fera-t-il une concurrence dangereuse aux bureaux d’études? Mais quel bureau d’études accepterait d’aller travailler dans un pays lointain tout en étant déficitaire ? Même si les futures missions d’HSF doivent couvrir le coût de l’emploi-jeune (bien peu d’argent en définitive, étant donné la subvention de l’Etat), elles ne couvriront pas le travail gratuit des seniors. Le travail ne se fait pas sur les mêmes “créneaux”. HSF prend le travail que les bureaux d’études ont refusé car non rentable. Quant aux bureaux d’études locaux, l’un des buts de HSF n’est-il pas de collaborer avec eux en leur apportant un complément de compétence ? HSF ne demande pas à ses membres un “chèque en blanc” sur ses activités futures. Que les inquiets “se mouillent” et participent au Conseil d’Administration!

Voila le débat relancé. ..Le prochain Journal apportera-t-il d’autres réactions ?

Nicole BETHOUX

Réactions de “Jeunes”

“La création d’emplois-jeunes relève de deux points :

1er point = suivi de l’Association

2è point = création d’un pôle ingénieur-projet HSF

Je suis entièrement d’accord avec la note de Brice “Quelle relève à HSF ?” (distribuée à l’Assemblée générale). La création d’emploi pour le suivi de l’Association permettra l’implication forte de Jeunes dans la capitalisation d’expérience. Cet engagement permettra une structuration encore plus forte des compétences (souci de formation personnelle et de capitalisation). Cela sera à long terme un apport très bénéfique.

Quant au deuxième point de création d’emploi, la situation est aussi très favorable. Le nombre de projets est toujours croissant, un suivi technique à long terme est de plus en plus demandé. Ce pôle pourra aussi permettre l’acquisition d’expérience pour de jeunes diplômés dans le cadre d’une recherche d’emploi,l’amélioration des compétences et de l’efficacité de l’Association sur le terrain.

Le problème financier n’est pas majeur. Les aides sont importantes. Les dépenses engendrées (salaire, logistique, local...) seront couvertes par les démarches de prospection des “employés”

Philippe CHORIER (EddF)

EddF (Eau delà des Frontières) est une petite Association : 15-20 membres, soit encore étudiants, soit en début de vie professionnelle. Ils travaillent actuellement sur la rénovation d’un petit réseau d’irrigation dans le cadre d’un projet de jumelage entre un village burkinabé et Châtillon sur Seine (21). HSF est disponible pour les aider (réunions de travail-conseil), comme cela a été fait pour le Maroc, les années précédentes.

Un autre point de vue

Ayant assisté à l'Assemblée Générale du 31 janvier, je me suis interrogée, depuis, sur le bien fondé de la création d'un (ou deux) emploi-jeune, au sein d'Hydraulique sans Frontières Pour répondre à cette question, je me suis penchée sur ma propre situation et sur celle de nombreux jeunes dans mon entourage. Voilà un an et demi que je cherche du travail, n'ayant obtenu, jusqu'à maintenant, que deux CDD de courte durée. Le problème du chômage des jeunes est une réalité dont il faut tenir compte. Il n'est pas rare qu'ils mettent plus d'un an pour trouver du travail. Les recruteurs semblent faire un "blocage" sur le manque d'expérience des jeunes diplômés. Pour pallier cela, HSF propose déjà une formule très intéressante qui est le partenariat entre jeunes diplômés et ingénieurs confirmés. La création d'un emploi-jeune permettrait ,étant donné sa durée de cinq ans, à deux-trois personnes de profiter pleinement de cet avantage.

Cet emploi leurs permettrait d'acquérir un complément de formation absolument exceptionnel, quand on voit la multitude de connaissances qui se dégage des membres d'HSF, ainsi que plusieurs mois d'expériences professionnelles à valoriser sur un curriculum vitae. Ces personnes seraient beaucoup mieux équipées pour trouver un travail dans les entreprises.

Il est vrai que la rémunération est moindre mais il est également évident que ce type de travail n'est que provisoire. Combien de jeunes ingénieurs, aujourd'hui, travaillent à l'usine ou dans une pizzeria, pour gagner le SMIC mais rester indépendant, en attendant de trouver un travail correspondant à leur domaine d'activité? A choisir, entre ces deux perspectives, moi je n'hésiterais pas.

Nathalie MARTET