Compte-rendu de la mission ISF-HSF à SAYA (BOLIVIE)
Après cinq semaines à SAYA, petit village perdu dans la cordillère, nous voici de retour dans le luxe et le confort français, pour faire le point sur notre première longue mission dans ce projet de rehaussement de barrage. Fatigués mais chargés de globules rouges, une foule d'images et de couleurs défilent devant nos yeux, de ce village, inaccessible encore par la route, de ses habitants si chaleureux, de ces longues marches nécessaires pour monter jusqu'au lac.
Mais avant d'organiser un peu tous ces souvenirs, commençons par rappeler brièvement le contexte de cette mission. Voilà bientôt trois ans que le groupe ISF (Ingénieurs sans Frontières) de Besançon est en contact avec SAYA par l'intermédiaire de coopérants français à La Paz et de Javier Ochoa, originaire du village. A SAYA, l'eau manque cruellement pour irriguer les champs. Seules les familles ayant participé il y a une quinzaine d'années à la construction du barrage ont droit à certaines heures d'irrigation et le volume actuel de la retenue est insuffisant pour couvrir toute la saison sèche.
Une visite de Brice Wong en octobre 96 a permis d'établir un diagnostic technique et de travailler sur différentes solutions. Afin de diminuer la quantité de béton nécessaire et de résoudre conjointement le problème de l'approvisionnement en sable, l'idée finale fut celle d'un barrage en enrochements. La solution consiste à rehausser le barrage actuel par un massif de béton cyclopéen s'appuyant sur lui en aval et équilibré par un enrochement. Deux tubes PVC permettent de récupérer l'eau en aval.
Cette première mission (réalisée en partie grâce à l'aide de 20 000 F d'HSF) en amorçant la partie inférieure du massif de béton cyclopéen, devait déjà permettre une consolidation de l'ouvrage existant dont les fuites étaient nombreuses. Munis d'une maquette de rehaussement (merci Bruno), nous avons pu, dès notre arrivée au village, expliquer efficacement aux villageois ce que nous leur proposions et ce qu'il était possible de faire ensemble cette année.
Après la création d'un comité de gestion des travaux sur le barrage, les villageois se sont organisés pour répartir les travailleurs en deux équipes parmi les 46 familles ne disposant pas encore d'eau et distribuer les tâches (transport du ciment, récupération d'une certaine quantité de pierres et de sable par personne...), toute tâche non effectuée ou toute absence à une réunion étant sanctionnée par une amende. Après des débuts lents et difficiles où il nous a fallu faire face, tout d'abord au temps (froid et pluie début août), ensuite au manque de préparation des travaux (aucune pierre n'avait encore été ramassée, l'état du chemin ne permettait pas le passage des mules..., nous nous sommes nous aussi ("les gringos") organisés en deux équipes, ce qui permettait de n'avoir à monter que tous les deux jours au lac situé à 4000 m environ : à partir du village s'étageant entre 3000 et 3200 m, il nous fallait plus de deux heures de marche à la montée et entre une heure et une heure et demie à la descente.
Les journées de travail (cinq à six heures au barrage) où ensemble nous avons charrié les pierres, du sable et coulé du béton se sont déroulées dans la bonne humeur et pour eux, à grand renfort de feuilles de coca et de cigarettes. Quant à nos journées de repos au village, nous les mettions à profit pour discuter avec les femmes pendant qu'elles faisaient la cuisine ou lavaient à la fontaine" ; ou encore, nous visitions les environs.
Dans tous les cas, nous avons beaucoup échangé et beaucoup appris. Au terme de ces cinq semaines de travaux, les tubes et les vannes sont posés, le massif de béton arrive à 40 cm en dessous du haut du barrage (haut de 4,10 m), l'enrochement est bien amorcé et sera à terminer par les villageois avant la saison des pluies. Ils devront avant l'été prochain continuer autant que possible l'enrochement de façon à permettre à la mission suivante d'amorcer le plus rapidement possible la surélévation elle-même. D'autres jeunes d'ISF partiront donc l'année prochaine poursuivre ce projet ... et pourquoi pas avec des personnes d'HSF !