QUELQUES LECONS (à méditer) sur la COOPERATION
..."Un bon climat politique est indispensable à une bonne coopération. Face à des interlocuteurs non responsables, non crédibles, il est inutile de tenter de développer un partenariat qui n'a aucune chance de fonctionner. Ensuite,(il faut) la dimension institutionnelle qui consiste d'abord à se demander de part et d'autre si on a les capacités de faire ce que l'on veut faire, puis à identifier très clairement le rôle et l'intervention de chacun. Enfin, la recherche de la proximité. Par le passé, la coopération au développement a souffert de trop d'intermédiaires. Il est urgent de dé-bureaucratiser, de décentraliser, d'adapter les procédures, les méthodes de travail, les critères d'évaluation, de les rendre plus flexibles et susceptibles de s'adapter à toutes les situations.
Jean BOSSUYT Centre Européen de Gestion des Politiques de Développement
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..."L'assistance technique a indéniablement contribué à améliorer le niveau de compétence professionnelle de milliers de cadres africains et a permis de combler de graves lacunes... Cela dit, elle a globalement échoué en tant que système, de même que les efforts des pays sahéliens pour améliorer les conditions de vie des populations. Ce constat découle-t-il de la nature de l'instrument de l'assistance technique ?
Plutôt de la manière dont il a été utilisé. La proximité culturelle est un élément fondamental de la transmission de connaissances. Or l'assistance technique, notamment bilatérale, est restée "une affaire de Blancs". Depuis plus de 30 ans, les "expatriés" qui forment le gros bataillon de l'assistance technique en Afrique n'ont guère cherché à se rapprocher des Sahéliens. D'où des frustrations et un sentiment de malaise. Ensuite, la coopération technique n'a pas été prise au sérieux par les gouvernements africains. Elle est considérée au mieux comme un bien gratuit, au pire comme un mal nécessaire
Les donateurs sont apparus comme étant les demandeurs, offrant des primes pour envoyer des coopérants ! Enfin, on a sans doute trop mis l'accent sur les process techniques. Le sous-développement est apparu comme un problème que l'on pouvait résoudre par le transfert des techniques et des savoir-faire. Si la pratique ne suivait pas, c'était faute de "volonté politique". On en vient aujourd'hui à se demander si l'assistance technique ne s'est pas laissée prendre aux illusions économiques de la rationnalité.. Ce qu'il faut, ce n'est pas plus de gestion ou de programmation, mais plus de sagesse. Concrètement, qu'est-ce que cela signifie ?
Quelques principes de bon sens. D'abord, il faut prendre son temps, organiser les consultations et les participations, garantir les consensus sociaux. Ensuite, il faut tirer parti de l'expérience acquise. Les congrégations missionnaires et certaines ONG de développement offrent des modèles réussis de coopération immergée, parce que fondés sur le principe de proximité. Il faut aussi privilégier les qualités humaines. On devrait entrer en coopération technique comme on entre en religion : l'humilité, le respect et l'écoute patiente des pauvres sont des qualités hautement professionnelles dans ce domaine. Enfin, il faut savoir être têtu, comme l'est la nature au Sahel. De génération en génération, la coopération doit poursuivre les mêmes tâches, aussi ennuyeux que cela puisse parfois paraître."
Pierre-Claver DAMIBA Ancien Directeur du PNUD pour la région Afrique
1 tiré du Bulletin d'Information n° 16 (Printemps 1997) du Club du SAHELl